Cérémonie de remise des diplômes 2022 : paroles de normaliens et normaliennes
Rencontre avec quatre diplômés et diplômées
Le 17 février 2023 se déroulait la cérémonie de remise des diplômes 2022 de l’ENS-PSL. Aujourd’hui élève-ingénieur du Corps des Ponts, des Eaux et des Forêts, doctorant en droit européen ou en biologie computationnelle, spécialiste de Montaigne… Quatre normaliens et normaliennes reviennent à cette occasion sur leurs années passées à l’École et nous font part de leurs futurs projets.
« L’ENS fut pour moi le moment où je suis devenue adulte à de nombreux égards. »
Éva Simon, diplômée du département Littératures et langage - doctorante en littérature à Sorbonne Université.
Pouvez-vous vous présenter ?
Étudiante, j’ai suivi un parcours classique, d’un master de littérature à une agrégation de lettres classiques, qui m’ont ensuite menée à une thèse sur Montaigne. Mais j’ai aussi, grâce au soutien de mon tuteur et de mes professeurs de l’ENS, beaucoup voyagé, beaucoup dansé, j’ai beaucoup ri au Théâtre de l'École, et j’ai savouré chaque instant passé dans notre poétique cour, dans notre cantine et nos salles de classes délicieusement anciennes.
Quel bilan pouvez-vous faire de vos années à l’École ?
L’ENS fut pour moi le moment où je suis devenue adulte à de nombreux égards. « Venez comme vous êtes » dit la chanson de Nirvana. C’est ce que j’ai ressenti quand je suis entrée ici, où l’originalité devient enfin libre de s’exprimer et où les personnalités se rencontrent avec une grande gratuité.
« Ce diplôme représente symboliquement la fin d’une période à laquelle je suis heureuse de rendre hommage. »
Quels sont vos projets pour la suite ?
Je souhaiterais continuer à faire mes deux passions que sont la danse et la littérature. Je ne sais s’il existe une profession qui puisse rassembler les deux. L’idéal serait un mélange du métier de chorégraphe et de professeur de lettres amoureux de la littérature. J’ai l’idéalisme de me dire que je vais peut-être réussir à créer un tel projet.
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« L’ENS offre un espace de liberté sans équivalent pour réaliser ses projets personnels et professionnels »
Brian Levardon, diplômé du département d'économie, ingénieur-élève du Corps des Ponts, des Eaux et des Forêts
Pouvez-vous vous présenter ?
Je viens de terminer mon cursus à l’ENS et à la Paris School of Economics (PSE) après cinq années à osciller entre le département d’économie et celui de géographie pour me former aux enjeux de transition écologique. Cette double formation m’a appris à confronter les points de vue et les méthodes, à conjuguer l’enquête de terrain à l’analyse de données, pour mieux comprendre le fonctionnement des systèmes socio-économiques et identifier des leviers d’action. J’ai ainsi pu réaliser diverses expériences de recherche sur les thématiques environnementales dans des contextes bien différents : en Arizona, dans les Vosges, à l’ONU à New York ou encore au Costa Rica.
« Ces cinq années d’études m’ont permis de me construire en tant que citoyen engagé. »
Quel bilan pouvez-vous faire de vos années à l’ENS ?
L’ENS offre un espace de liberté sans équivalent pour réaliser ses projets personnels et professionnels et il me semble important d’être conscient de ce privilège. Tout autour de moi, j’ai pu voir émerger des projets, plus fous les uns que les autres, portés par des personnes dont la passion était source de nombreuses inspirations. Au-delà de la formation et de la recherche académique, force est de constater que ces cinq années d’études m’ont aussi permis de me construire en tant que citoyen engagé grâce aux nombreuses rencontres que j’ai pu y faire.
Que représente pour vous d’être diplômé de l’ENS ?
Ce diplôme est le symbole de la fin d’un cycle d'études qui a commencé dès les classes préparatoires, une époque je ne savais pas encore vers quel type de carrière je souhaitais m'orienter. C’est, en quelque sorte, l’aboutissement de mes vagabondages transdisciplinaires à chercher des réponses à mes questions sur la transition écologique qui n’ont, par ailleurs, jamais été totalement résolues. Il clôt ainsi une période foisonnante et stimulante, marquée par une diversité d'expériences qui m'ont amené à évoluer dans des environnements professionnels qui me paraissaient auparavant inaccessibles. Toutefois, je ne peux m’empêcher de penser que cette diplomation n’est qu’une étape vers la suite : mon engagement au sein du service public où j’espère continuer à mobiliser mes compétences interdisciplinaires pour le développement de modes de vie plus soutenables.
Quels sont vos projets pour la suite ?
J’ai intégré le corps des Ponts, des Eaux et des Forêts en tant qu'ingénieur-élève en septembre dernier, ce qui m'amènera à travailler dans les services déconcentrés du Ministère de la Transition écologique dès septembre 2023. J'espère pouvoir travailler plus spécifiquement sur les politiques de protection de la biodiversité ou d'adaptation au changement climatique, en accompagnant les collectivités locales dans l'élaboration de leurs politiques environnementales. À plus court-terme, je vais terminer ma formation par une mission au bureau de l’Agence Française du Développement (AFD) au Costa Rica sur le financement de projets climat et biodiversité. Que ce soit en France ou à l'étranger, cela n'augure que du bon !
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« Être diplômé de l’ENS est avant tout une légitimation de ma formation pour la recherche »
Rémi Trimbour, diplômé du département de biologie du programme Médecine-Sciences, doctorant en biologie computationnelle à l’Institut Pasteur et à l’Université d’Heidelberg (Allemagne).
Pouvez-vous vous présenter ?
Après l’obtention de mon baccalauréat scientifique en 2017, j’ai entamé des études de médecine à Strasbourg. J’ai eu l’occasion d’y rencontrer des professeurs passionnés par la recherche, et cela m’a motivé à rejoindre le programme double cursus médecine de l’université. J’ai eu la chance de rejoindre l’année suivante celui de Médecine-Sciences proposé par l’ENS. J’y ai suivi des cours de biologie, de mathématiques et d’informatique principalement.
Quel bilan pouvez-vous faire de vos années à l'ENS ?
Après avoir commencé des études de médecine, la liberté que j’ai eu pour choisir mes cours dans l’environnement pluridisciplinaire qu’est l’ENS était très agréable. J’ai pu compléter ma formation clinique par un enseignement bien plus théorique, qui a complètement changé mes perspectives professionnelles.
J’y ai aussi rencontré de merveilleuses personnes, notamment à l’internat. À notre étage, tout au long de l’année 2020, nous avons cuisiné et mangé tous ensemble tous les soirs. Si nous manquions de temps, nous cuisinions à tour de rôle pour les autres. Tous ces moments de partage nous ont beaucoup apporté humainement, nous ont aidé à mieux vivre les confinements successifs, et resteront de super souvenirs.
Que représente pour vous d'être diplômé de l'ENS ?
Être diplômé de l’ENS est avant tout une légitimation de ma formation pour la recherche, au-delà de la médecine clinique. Je n’aurai jamais eu l’opportunité de m’orienter vers la biologie computationnelle sans une formation aussi pluridisciplinaire et une école aussi tournée vers la recherche fondamentale.
Quels sont vos projets pour la suite ?
J’ai commencé en septembre ma thèse de recherche entre l’université d’Heidelberg et l’Institut Pasteur. J’hésite encore entre reprendre les études de médecine directement après, ou enchaîner sur un post-doctorat à l’étranger avant : cela dépendra des opportunités.
Sur le plus long terme, j’espère avoir l’occasion de travailler en cancérologie, et de partager mon temps entre clinique à l’hôpital, et développer de nouvelles méthodes pour prédire des traitement personnalisés et optimaux pour chaque personne atteinte.
« Nulle part ailleurs je n’ai autant apprécié être en désaccord avec autrui. »
Jean-Baptiste Roche, diplômé du département de sciences sociales, doctorant en droit à Panthéon-Assas Université.
Pouvez-vous vous présenter ?
Après des études secondaires au collège et lycée à l’Institution des Chartreux à Lyon, j’ai effectué deux années de classes préparatoires B/L au Lycée Henri IV. J’ai intégré l’ENS-PSL à l’issue de ma khâgne sans avoir une idée précise de ce que je souhaitais étudier. J’étais attiré par l’histoire et la philosophie politique mais j’avais aussi un intérêt plus ancien pour le droit. L’ENS m’a donné l’opportunité de cumuler ces deux orientations et j’ai suivi l’essentiel des cours de droit proposés par l'École sous la tutelle du professeur Jean-Louis Halpérin, tout en continuant à faire de l’histoire et de la philosophie en parallèle. L’enseignement du droit à l’ENS est très axé sur la philosophie, l’histoire du droit ainsi que le droit international. Cela m’a beaucoup plu, mais mon engagement pro-européen m’a finalement conduit au droit de l’Union européenne, en particulier ses aspects économiques et le droit de la concurrence.
Quel bilan pouvez-vous faire de vos années à l’ENS ?
Ma scolarité au sein de l'École normale a été très enrichissante. Je salue en particulier la grande liberté qui m’a été accordée dans mes choix de cours et plus généralement dans l’organisation de mon parcours. Dans la mesure où je me suis orienté dans une direction somme toute assez différente de ma trajectoire originelle, cela m’a été très précieux. Le suivi et l’accompagnement sont également d’une qualité incomparable. Je n’ai pas d’anecdote précise en tête mais j’aimerais souligner la grande ouverture d’esprit des professeurs avec lesquels j’ai pu échanger. Si je devais résumer ces échanges en une phrase, je dirais que nulle part ailleurs je n’ai autant apprécié être en désaccord avec autrui. Il s’agit-là d’une qualité de débat suffisamment rare pour être célébrée.
Que représente pour vous d’être diplômé de l’ENS ?
Je dirais qu’il s’agit d’une forme d’accomplissement. Cela vient conclure un voyage périlleux entamé il y a de cela presque six ans maintenant. Entrer à l’ENS n’a pas été facile, déterminer quoi faire de ce succès ne le fut pas non plus. Il est des événements qui obligent autant qu’ils honorent. En somme, un cycle s’achève et un autre s’ouvre : pouvoir regarder avec satisfaction le cycle précédent est d’un réconfort considérable face à celui qui vient.
Quels sont vos projets pour la suite ?
Je viens de commencer une thèse en droit européen de la concurrence - sur la notion d’efficience - et je donne également des travaux dirigés en droit européen à Panthéon-Assas Université. Dans la continuité de la vocation originelle de l'École, enseigner est un véritable objectif pour moi et j’y prends un réel plaisir.
Dans la mesure où je suis convaincu que dans mon domaine cela fait de moi un meilleur chercheur et un meilleur enseignant, je travaille également en parallèle pour un cabinet d’avocats que j’assiste dans le traitement de plusieurs dossiers sensibles. L’alliance de la pratique et de la théorie m’a en effet toujours semblé féconde. A l’heure actuelle, je n’ai d’autre ambition, qui n’est pas si mince, que de soutenir une thèse de la meilleure qualité possible en servant au mieux ceux qui m’ont fait confiance. La suite attendra l’ouverture du prochain cycle…
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