Deux chercheuses de l’ENS-PSL reçoivent le prix Jeunes Talents 2024 pour les Femmes et la Science
Félicitations à Sibylle Marcotte et Xiaowen Chen
Félicitations à Sibylle Marcotte, doctorante au sein du Département de mathématiques et applications (DMA) et du Centre sciences des données à l'ENS-PSL, et à Xiaowen Chen, post-doctorante au Département de physique de l'ENS-PSL. Toutes deux sont lauréates du prix Jeunes talents France 2024 de la Fondation L’Oréal-Unesco pour Les Femmes et la Science (Young Talents Award 2024 For Women in Science France).
Sibylle Marcotte, doctorante au sein du Département de mathématiques et applications (DMA) et du Centre sciences des données à l'ENS-PSL
Améliorer la compréhension des outils d’apprentissage automatique
Sibylle Marcotte est doctorante au sein du Département de mathématiques et applications et du Centre sciences des données. Ses recherches se concentrent sur la compréhension mathématique de l’apprentissage automatique qui permet aux ordinateurs de «voir» et d’identifier des objets, des personnes et des scènes, ainsi que l’interaction avec l’être humain, notamment à travers des modèles de langage tels que ChatGPT d’OpenAI.
C’est dans le cadre de sa thèse en mathématiques à l’École normale supérieure, qu’elle décrypte le fonctionnement des systèmes complexes qui offrent aux ordinateurs la possibilité de réaliser des performances telles que la reconnaissance d’images ou la traduction de langues en temps réel.
« Il y a une solidarité certaine entre femmes scientifiques et je ressens une réelle fierté à évoluer dans cet univers. »
Vous venez de recevoir le Prix Jeunes talents France 2024. Que représente cette distinction pour vous ?
Sibylle Marcotte : Le prix est une belle reconnaissance de mes travaux de recherche, je suis fière de le recevoir ! C'est un prix qui est très prestigieux, qui apporte une importante visibilité, et qui représente un véritable tremplin dans une carrière scientifique. J'ai été également très heureuse d'avoir l'occasion de rencontrer les autres lauréates et de découvrir leur travaux de recherche stimulants.
Quels sont les enjeux de vos recherches et leurs applications ?
Sibylle Marcotte : Mes recherches se concentrent sur la compréhension mathématique de l’apprentissage automatique qui permet aux ordinateurs de « voir » et d’identifier des objets, des personnes et des scènes, ainsi que de comprendre notre langage, de le traduire, de l’écrire et de répondre à nos questions, notamment à travers des modèles tels que ChatGPT. Aujourd’hui, les technologies utilisées sont encore mal comprises sur le plan théorique. Une meilleure compréhension de la dynamique d’apprentissage pourrait mener à des entraînements plus efficaces des réseaux de neurones.
Pourquoi avez-vous choisi une carrière scientifique ?
Sibylle Marcotte : Cela n’a pas forcément été un choix évident car j’aimais aussi beaucoup la musique et les lettres. Les mathématiques représentaient pour moi à la fois un défi intellectuel et une forme très particulière de beauté. En effet, l’abstraction des mathématiques, leur côté visuel, résonnaient avec mes goûts artistiques. Et en même temps, le monde mathématique laisse peu de place au doute avec sa logique implacable – c’est un aspect que je trouve très rassurant.
Dans votre parcours, avez-vous rencontré des difficultés en tant que femme ?
Sibylle Marcotte : Je pense qu’il est plus difficile pour une femme d’être prise au sérieux ou de montrer de la confiance en soi, quand cette même confiance est habituellement valorisée chez un homme. Cependant, il y a une solidarité certaine entre femmes scientifiques et je ressens une réelle fierté à évoluer dans cet univers. J’ai notamment eu la chance de côtoyer deux brillantes chercheuses, Karine Beauchard et Magalie Fromont Renoir, à l’ENS de Rennes, qui ont été des mentores durant mon parcours d’étudiante. Je leur en suis très reconnaissante et j’espère à mon tour valoriser l’image des femmes en science.
Quel(s) conseils donneriez-vous à des jeunes filles qui souhaiteraient s'orienter dans les études scientifiques ?
Sibylle Marcotte : De ne pas hésiter ! Ce sont de belles études, très prometteuses, et qui ouvrent la voie à de nombreux métiers. Il est aussi essentiel de bien s'informer, par exemple sur le choix des différentes options depuis la réforme du bac et qui n'offrent pas les même chances d'accès, notamment pour les classes préparatoires scientifiques. Il y a par exemple l'association Femmes et Mathématiques qui propose des échanges entre scientifiques et lycéennes dans le but de pouvoir les conseiller efficacement.
Xiaowen Chen, post-doctorante au département de physique de l'ENS-PSL
Comprendre les interactions entre les réseaux neuronaux et sociaux
Née à Shanghai, Xiaowen Chen parcourt les États-Unis tout en s’intéressant à des sujets scientifiques très divers : astrophysique, archéologie, physique moléculaire, atomique et optique... C’est finalement pour la physique des systèmes en interaction à l’échelle humaine qu’elle se passionne. Des neurones du poisson zèbre aux hordes de souris, elle étudie désormais les comportements sociaux, essentiels à la compréhension des groupes humains et animaux, dans le cadre de son post-doctorat au sein du laboratoire de physique de l’École normale supérieure de Paris.
« J’apprécie le sentiment d’appartenance à une communauté : les scientifiques du monde entier partagent tous la même passion pour la compréhension du monde. »
Vous venez de recevoir le Prix Jeunes talents France 2024. Que représente cette distinction pour vous ?
Xiaowen Chen : Je suis très heureuse de recevoir ce prix ! Pour moi, il symbolise l'excellence et représente une reconnaissance pour ce que j'ai déjà fait... C'est un énorme encouragement pour moi pour continuer à poursuivre ma carrière scientifique. Et cette distinction n'aurait pas pu avoir lieu sans le soutien de mes directeurs de recherches, de mes collègues, du laboratoire de physique et de l'ENS.
Quels sont les enjeux de vos recherches et leurs applications ?
Xiaowen Chen : J’étudie le comportement social des souris en modélisant leurs interactions. Je développe des outils mathématiques et physiques pour comprendre comment les interactions individuelles peuvent mener à des comportements collectifs complexes. Par exemple, je cherche à savoir comment les interactions individuelles entre souris au sein d’un groupe influencent leur comportement global. Grâce à ces mécanismes, nous pourrons mieux appréhender des phénomènes allant du fonctionnement du cerveau aux dynamiques sociales complexes.
Pourquoi avez-vous choisi une carrière scientifique ?
Xiaowen Chen : Une carrière scientifique combine le défi d’explorer l’inconnu à la responsabilité de travailler pour le bien commun, deux moteurs importants de ma vie. J’apprécie également le fait d’apprendre et de créer en permanence. Enfin, le sentiment d’appartenance à une communauté est fondamental pour moi : les scientifiques du monde entier partagent tous la même passion pour la compréhension du monde !
Dans votre parcours, avez-vous rencontré des difficultés en tant que femme ?
Xiaowen Chen : Pendant mon doctorat, j’ai pris conscience des obstacles rencontrés par les femmes dans le monde scientifique. Quelque fois, quand je parle en réunions scientifiques, je sens que je dois répéter plusieurs fois les choses pour que les gens m’écoutent. Ces comportements ont renforcé mon syndrome de l’imposteur. Malgré cela, je suis restée forte et j’ai continué à me battre pour poursuivre ma carrière dans la science.
Quel(s) conseils donneriez-vous à des jeunes filles qui souhaiteraient s'orienter dans les études scientifiques ?
Xiaowen Chen : Pour les filles qui envisagent de commencer des études scientifiques, je tiens d'abord à les féliciter. C'est merveilleux de s'intéresser aux sciences. Elles ont probablement déjà ressenti des joies, petites ou grandes, en regardant les étoiles ou en lisant des livres sur les énigmes mathématiques.
Si elle se demandent ce qui les attend, je leur dirai que c'est une aventure vers l'inconnu mais très stimulante. Il y a des défis, posés à la fois par les questions scientifiques et par les stéréotypes qui existent dans la société, mais elles doivent être convaincues qu'elles ont autant de capacités que les hommes et qu'elles peuvent beaucoup apporter à la science. Cependant, le chemin est parfois long pour y arriver...
Personnellement, j'ai eu de la chance car j'ai ressenti beaucoup d'encouragement de la part de ma famille, de mes professeurs et de mes pairs, et cela m'a beaucoup aidé à persévérer.
Grâce aux récents efforts de promotion des femmes scientifiques, et par exemple du Prix Jeunes Talents L'Oréal-UNESCO, j'espère que nous pourrons créer un environnement de plus en plus bienveillant, pour que les jeunes femmes continuent d'intégrer des études scientifiques et poursuivrent leurs rêves sans doutes ni peurs.
À propos du programme L'Oréal-UNESCO Pour les Femmes et la Sciences Le Programme Jeunes Talents France L’Oréal-UNESCO Pour les Femmes et la Science a pour objectif de valoriser et accompagner des jeunes doctorantes et post-doctorantes à un moment charnière de leur carrière professionnelle. Ces dernières reçoivent une bourse, mais également des formations, notamment à la prise de parole en public, le développement personnel, l’art de la négociation, ou encore sur la vulgarisation scientifique pour les aider à briser le plafond de verre. Le prix « Jeunes talents pour les femmes et la science France » est décerné chaque année par l'Unesco Organisation des Nations unies pour l'éducation, la science et la culture et la Fondation L'Oréal, par un jury composé de membres de l'Académie des sciences présidé par le président Alain Fischer |