Disparition de Pierre Morel (Promotion Sciences, 1952)
L'École normale supérieure rend hommage à Pierre Morel (S, 1952).
Né en 1933, Pierre Morel est entré à l'École normale supérieure en 1953. Après avoir passé l'agrégation de Physique, il est parti aux États-Unis, où il a occupé le poste de représentant à New-York de l'attaché scientifique à l'ambassade de France à Washington. Il y a aussi préparé une thèse avec le physicien américain Philip W. Anderson (Prix Nobel de Physique en 1977) sur des problèmes de transitions quantiques dans l'hélium liquide.
Revenu en France, il a totalement changé d'orientation et a rejoint la Direction scientifique et technique du Centre national d'études spatiales (CNES) nouvellement créée. Cela l'a amené à prendre la direction scientifique du projet Éole, destiné à étudier la circulation de l'atmosphère à l'aide de ballons plafonnants localisés par satellite (une technique totalement nouvelle à l'époque, ancêtre du GPS actuel).
Pierre Morel a pris pleine conscience de ce que deux outils nouveaux, l'observation satellitaire d'une part et le calcul électronique de l'autre, allaient totalement transformer la science de la météorologie et de l'atmosphère. Et il a décidé de se consacrer au développement d'une activité de recherche exploitant ces deux nouveaux moyens.
Cela l'a conduit à créer en 1968 le Laboratoire de Météorologie Dynamique (LMD), un nouveau laboratoire propre du CNRS. En 1970, grâce à l'appui d'Yves Rocard, alors directeur du Laboratoire de Physique de l'École normale supérieure, une partie du LMD s'est installée dans les locaux de la rue Lhomond. Cette partie s'est principalement consacrée au développement de la modélisation numérique de l'écoulement atmosphérique, qui s'est progressivement orientée vers l'étude de la climatologie, puis des atmosphères planétaires (une autre partie du Laboratoire, bientôt installée à l'École Polytechnique à Palaiseau, se consacrait aux expériences par ballons et à la préparation et à l'exploitation de missions spatiales).
Pierre Morel a rapidement pris des responsabilités d'organisation et de gestion scientifiques, aux niveaux national et international. Au-delà du projet Éole, mené à bien en 1971-72, il a participé au début des années 1970 à la préparation du projet international Global Atmospheric Research Program (GARP) d'organisation de nombreuses campagnes d'observation. Cela lui a ouvert de nombreux contacts internationaux, et lui a apporté une large reconnaissance au-delà de la France. Il a joué un rôle décisif dans plusieurs projets, en particulier le développement de la série des satellites Météosat. Il a très tôt pris pleinement conscience des conséquences climatiques de l'émission anthropique des gaz à effet de serre, et en parlait souvent dès le début des années 1970.
Il n'est cependant pas resté très longtemps à l'École normale supérieure, prenant bientôt une position de Directeur-Adjoint du CNES. Il a ensuite travaillé à l'Organisation Météorologique Mondiale à Genève, où il a animé les recherches sur le climat, puis à la NASA à Washington, où il avait la charge des programmes planétaires. Il n'en continuait pas moins à garder le contact avec son école d'origine, et avec les chercheurs qu'il y avait dirigés.
Pierre Morel a joué un rôle central dans le développement des sciences atmosphériques, en France et à l'étranger. Il laisse le souvenir d'une personnalité forte et volontaire, capable de lancer et de mener à terme des projets ambitieux. Et il laisse une forte influence sur nombre de ceux qui ont été en contact avec lui d'une façon ou d'une autre.
L’École dit toute son amitié et tout son soutien à sa famille, ses amis, ses élèves, et ses collègues.