Écocampus, l’association étudiante écologiste de l’ENS-PSL

L’Écocampusienne, racontée par Marina Giovannetti et Rodrigue Friaud

Jusqu’au 29 mai se tient l’Écocampusienne, une semaine dédiée à l’écologie sous toutes ses formes. Et si habituellement projections, ateliers et conférences se déploient dans tout l’ENS, c’est exceptionnellement en ligne que les normaliens de l’association vous invitent à réfléchir, échanger et agir, lors de rendez-vous ludiques et conviviaux. Rencontre avec Marina Giovannetti, présidente, et Rodrigue Friaud, secrétaire, pour en savoir plus sur l’association et ses projets.
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Louise Galamez (gauche, présidente 2018 d’Écocampus), Gabriel Hes (centre, membre actif d'Écocampus) et Rodrigue Friaud (droite, vice-président 2018) rentrant de leur stage de M1

Depuis plus de 10 ans, l’association Écocampus multiplie les actions autour de l’écologie sur le campus de l’ENS-PSL et au-delà. Créée initialement en 2009 pour développer le tri des déchets à l’ENS, elle s’est depuis diversifiée et compte aujourd’hui trois pôles de réflexion et d’action en faveur de l’environnement : Transition – Sensibilisation – Réflexion.

 

L’Écocampusienne 2020, un festival en ligne qui célèbre l’écologie sous toutes ses formes

L’événement phare de l’année pour l’association reste l’Écocampusienne. Depuis 2014, il envahit aux beaux jours les salles et jardins de l’ENS avec des ateliers, débats, discosoupe, projections en plein air, bal folk… « Ces événements sont ouverts au grand public et font connaître l’association et peut-être l’écologie sous une forme plus attrayante et inclusive qu’habituellement. » résument les deux normaliens.
Lorsqu’ils ont réalisé qu’il serait impossible de maintenir l’Écocampusienne sous sa forme habituelle, les membres d’Écocampus loin de renoncer à leur festival, décident de le réinventer. En fonction des contraintes techniques mais aussi de l’actualité, ils ont remanié le format autant que la programmation et sont parvenus en quelques semaines à mettre sur pied un événement accessible entièrement en ligne. L’édition 2020 inclut conférences, projections, concours photo, ateliers et débats autour de sujets comme l’écopsychologie, l’histoire écologique de la colonisation, la permaculture, mais aussi la crise sanitaire.
Une décision qu’ils ne regrettent pas malgré les nombreux obstacles. Au vu des circonstances, cette édition prenait plus de sens encore. «Je pense que l’écologie est un sujet d’autant plus important que la crise sanitaire et la crise climatique sont liées, justifie Marina. Maintenir l’Écocampusienne est un moyen de continuer, à distance, ce que nous faisions avant : sensibiliser, informer et essayer de faire changer les choses. »

« Nous souhaitions aussi maintenir une certaine forme de vie de campus alors que l’École ne va pas retrouver ses étudiant·e·s avant au moins septembre », ajoute Rodrigue, du même avis que la normalienne. Mais pour lui, organiser l’événement à distance, c’est aussi l’occasion d’atteindre un public plus large : « D’une manière générale nous avons du mal à toucher les étudiant·e·s à l’ENS : peut-être que nos activités ne sont pas assez attractives par rapport à l’ensemble des activités de divertissement ou d’engagement de la vie étudiante, ou alors que ces enjeux ne sont pas prioritaires dans la communauté étudiante. Avec cette semaine nous espérons toucher les normaliens et normaliennes qui a priori vont rester à leur domicile durant cette période. »

 

Apprendre de la crise sanitaire pour mieux construire le futur de l’écologie

Pour les deux normaliens, conscients de l’urgence écologique, une question se pose à chaque instant : comment faire pour avoir le moins d’impact possible sur l’environnement ? Pour certains il s’agira de moins prendre la voiture, pour d’autre de consommer moins. Marina essaye donc, tous les jours, de remettre en question ses habitudes, de se demander si elle ne pourrait pas faire les choses différemment : « J’essaye de ne pas prendre la voiture, l’avion quand je peux faire autrement. J’essaye de réduire la quantité de déchets que je produis ». Pour elle et pour Rodrigue, l’important est d’inscrire ces gestes dans une démarche plus globale, en se posant les bonnes questions : « est-ce que cette action vaut le coup ? Est-ce que je vaux les conséquences collectives de mes actions ? ».

Et lorsqu’on les interroge sur les conséquences de la crise sanitaire sur l’environnement, une des thématiques abordées pendant l’Écocampusienne, les normaliens sont mitigés.
Pour Marina, il est clair que « la crise sanitaire a mis les activités humaines en pause et que des effets positifs sur l’environnement ont suivi. » Elle reste cependant prudente quant à l’avenir : « nous ne pouvons pas savoir comment les choses évolueront. Cette crise a montré que nous sommes capables de changer radicalement notre fonctionnement, du jour au lendemain, que nous sommes capables de vivre en polluant moins, en consommant moins. J’espère que cela aura permis à quelques personnes de réaliser que tout cela est possible, et les incitera à changer leurs habitudes. Toutefois, certain.e.s risquent de vouloir relancer l’économie, quel qu’en soit le prix, faisant passer à la trappe toute considération écologique. Ce serait un énorme pas en arrière. Heureusement, beaucoup se battent pour que ce ne soit pas le cas, pour que notre économie soit plus « verte », et que nous ne retournions pas au monde d’avant. » avance-t-elle avec espoir.

Le point de vue de Rodrigue est tout aussi nuancé et si à très court terme, il a été prouvé que l’empreinte écologique humaine diminue, l’étudiant s’interroge à plus long terme et notamment sur la réalité des investissements en faveur de l’écologie qui seront faits : « je suis vraiment inquiet d’une reconstruction qui ira au moins cher et au plus facile, à ce que l’on fait depuis des décennies et que l’on connaît le mieux. À ce titre, ce serait un recul d’ambition conséquent, parce que les capacités de financement pour le changement auront été englouties par la crise. » Il s’interroge aussi sur une potentielle crise humanitaire, à l’ échelle européenne et ailleurs dans le monde, où des populations sont extrêmement dépendantes du tourisme mondialisé, de leurs exportations. « Cette crise sera peut-être un gain du côté de l’environnementalisme - et encore - mais le prix social à payer sera très lourd… »

L'étudiant reste néanmoins convaincu que l’on apprend aussi des crises : « apprendre sur notre capacité à changer collectivement et rapidement nos comportements s’il le faut, à écouter les scientifiques, à mobiliser des moyens mais aussi reconnaître nos lacunes : manque de coopération internationale, influence délétère des fake news, fardeau des endettements écologique et économique qui réduit la capacité des générations futures à gouverner ou encore incapacité des scientifiques à s’organiser pour exprimer un consensus, des recommandations claires ou d’ailleurs des incertitudes collectives. C’est un sujet que nous développons d’ailleurs lors de cet édition d’Écocampusienne :  il faut apprendre de cette crise sur ce que nous sommes capables de faire et à quel point nous sommes vulnérables mais aussi à quel point nous pouvons nous mobiliser si nous nous en donnons les moyens et réalisons des arbitrages éclairés. » conclut-il.

 

Ecocampusienne : du 22 au 29 mai 2020 – Inscription et programmation ici

Vous souhaitez approfondir certaines thématiques abordées dans l’article et lors de l’Écocampusienne ? Découvrez quelques recommandations des membres d’Écocampus.

Marina
« Récemment, j’ai écouté l’épisode “Quel avenir pour la Convention Citoyenne pour le Climat ?” de l’émission Le Téléphone sonne sur France Inter, qui revient sur le rôle de cette Convention écologique phare, notamment vis à vis de la sortie de la crise.
J’ai aussi regardé le documentaire Cowspiracy (disponible en intégralité sur YouTube) à propos de l’impact environnemental de l’agriculture animale.
Je conseillerais aussi cet article du Journal du CNRS, à propos d’initiatives scientifiques pour trouver des solutions à la crise climatique ».

 

Rodrigue
« En ce moment il y a une contribution de recherche dans l’urgence reliée à la crise et la situation inhabituelle qui est un objet d’étude spontané. Je pense que chacun·e dans sa discipline a tout intérêt à regarder cette littérature.
Sinon je recommande une approche bien plus généraliste en restant informé sur l’écologie dans les médias grand public. Aussi, la Convention citoyenne pour le climat est une expérience humaine collective très intéressante que l’on peut suivre à travers les podcasts et auditions qui ont été enregistrées. Pour aller un peu plus loin les résumés pour décideur·e·s du GIEC et de l’IPBES ne sont pas si longs à lire et constituent un condensé phénoménal des sciences et, je le pense, une marche à suivre dans d’autres domaines. »
 

En savoir plus sur les champs d’action des pôles qui font Écocampus

Le pôle transition veut faire connaître et réduire l’empreinte écologique des campus de l’École. Son ambition : atteindre une forme d’exemplarité écologique (projet bilan carbone, tri des déchets, travail avec le restaurant scolaire, concertation avec l’administration de l’École…). « Un idéal serait une transition de toutes les activités : d’enseignement mais aussi de recherche et de l’administration, car leur impact environnemental est considérable. À ce titre nous accueillons chaleureusement les initiatives de type Labos 1point5 ou le Green Committee de l’IBENS de l’Institut de biologie de l’École, par exemple. » expliquent Rodrigue Friaud et Marina Giovannetti.

Le pôle sensibilisation vise à lui à éveiller la conscience écologique au sein du campus et au-delà grâce à des ateliers pratiques (couture, cuisine, potager…) ou simplement de l’information comme avec le Guide de l’étudiant·e écolo (comment choisir son stage, son plat au restaurant de l’École, trier ses déchets…).

Le pôle réflexion ou Groupe d’études écologiques propose régulièrement différents rendez-vous, conférences, ateliers-débats ou projections. « Ce sont des événements grand public mais nous essayons aussi de toucher la communauté de l’École à travers eux. » précise Marina Giovannetti, membre de l’association depuis son arrivée à l’ENS en 2019 et présidente depuis début 2020.

Impliquée dans la vie du quartier, Écocampus fait aussi partie de plusieurs regroupements d’associations à l’échelle locale (Écoquartier latin, par exemple) et collabore avec les associations de proximité comme LUPA à Jussieu. Membre du Réseau français des étudiant·e·s pour le développement durable (REFEDD), elle travaille aussi régulièrement avec les associations écologiques d’autres écoles comme dont celle AgroParisTech pour l’organisation de projets à plus grande échelle.

 

Marina Giovannetti
Marina Giovannetti