L’emblématique cour Pasteur en travaux

Moins connue que la cour aux Ernest, cœur battant du 45 rue d’Ulm, la cour Pasteur est pourtant tout aussi appréciée par les étudiants et les personnels de l’ENS qui sont nombreux à la fréquenter. Véritable havre au cœur de la ville, loin de l’effervescence du campus, il n’est pas rare aux beaux jours d’y entendre le chant des oiseaux et le bruit du vent dans les arbres. Jouxtant l’ancien bureau de Louis Pasteur, qui fut autrefois administrateur de l’École, on imagine sans peine le scientifique faire les cent pas dans la cour, cherchant l’inspiration.
Le mûrier, qu’il avait planté pour ses recherches est d’ailleurs toujours là. Témoin d’un autre temps, il est classé « arbre remarquable » par la Ville de Paris.

Un espace vert protégé et un lieu de vie

Comme le reste de l’établissement, ce lieu d’histoire a évolué au fil des années. « Il y a eu plusieurs aménagements successifs pour le préserver, mais ceux-ci ont perdu en cohérence d’ensemble », explique Yannick Laurenty, adjoint au chef du service patrimoine et chef du pôle des opérations immobilières de l’ENS-PSL. « Réfection du jardin central, réorganisation de la zone de tri des déchets, changement de mobilier urbain fixe », de nombreux changements sont souhaitables au vu de l’état et des usages de cet « espace vert protégé au titre du plan local d'urbanisme (PLU) de la ville de Paris [qui] dispose d’un beau potentiel végétal et patrimonial ».

En 2021, une enquête interne préliminaire est donc réalisée afin d’en savoir plus sur les usages de la cour Pasteur : « Les étudiants et le personnel de l'ENS apprécient à la fois le calme et la convivialité du lieu. Ils s’y rendent principalement pour travailler et lire, ainsi que pour leur pause déjeuner », résume Yannick Laurenty. « C’est un endroit très populaire, et les travaux doivent valoriser l’existant, tout en prenant en compte les activités des usagers. »

L’enquête permet d’affiner l’orientation du projet de réhabilitation de la cour Pasteur et d’enclencher les premières démarches. Le programme, validé en juin 2021, montre la nécessité d’intervenir sur l’ensemble de la cour afin d’intégrer les diverses fonctions et contraintes au projet de rénovation : la mise en valeur du site, le développement d’espaces accessibles, les réparations techniques impératives, etc. Le chantier qui débute en février 2023 est prévu pour durer 9 mois.

Trois grands axes de réhabilitation

La réhabilitation de la cour Pasteur est construite sur trois axes principaux : valoriser le caractère naturel des lieux et étendre les surfaces appropriables par les usagers, tout en intégrant des contraintes techniques nécessaires au fonctionnement de l’École, comme l’accessibilité et les cheminements, la gestion des déchets ou bien encore l’organisation d'événement.

Découpée en trois zones – le point de collecte des déchets, le jardin et la courette du marronnier (voir schéma ci-dessus) – la cour va faire l’objet de plusieurs transformations majeures : « la première est la création de parois en bois ajourées, appelées claustras, pour habiller la zone de tri des déchets à l’entrée du jardin et au niveau de la courette du gymnase », détaille Yannick Laurenty. « Nous allons pour cela réorganiser les modes de stockage et d’enlèvement des déchets électroniques, mais aussi réduire la taille de la benne des encombrants. »
 
La deuxième grande transformation consiste à étendre le jardin jusqu’à l’intérieur du mail arboré (l’allée principale sur le schéma ci-dessus). « Les haies à feuilles persistantes de bambou et de thuya seront remplacées par des plantations en pieds d’arbres, bien plus économes en eau. »

Enfin, la réfection de la courette du marronnier vise à la rendre plus accueillante pour les usagers. « Elle sera aménagée à la manière d’une cour parisienne, avec des matériaux naturels, l’installation de pavés enherbés et la création d'un banc monumental autour du marronnier », détaille Yannick Laurenty. Il s’agit de créer un nouveau lieu aménagé, arboré et protégé du vent pour les usagers.

Une démarche environnementale

« Ces travaux s’inscrivent pleinement dans une démarche environnementale », précise-t-il. « La surface végétale va être étendue jusqu’au mail arboré. En réduisant la surface minérale, nous atteindrons l’objectif de surface végétalisée exigée par la Ville de Paris, qui impose de respecter au moins 2 600m² d’espaces verts. » Le mûrier de Pasteur, que l’âge a fragilisé, bénéficiera d’une attention particulière. Un accès restreint en base du tronc sera créé par la plantation d’un couvert végétal de massif. En éloignant un peu les usagers, il agira comme une double protection, de l’arbre et des promeneurs.

L’actuel mobilier en béton fixe du jardin sera enlevé au profit de bancs, tables et chaises en bois et métal, réduisant de facto l’impact sur l’imperméabilisation du sol. « Ces meubles d’extérieur pourront être déplacés. Cela facilitera l’appropriation des lieux, selon le type d’activité, la volonté de se regrouper ou non et la météo », précise le chef du pôle des opérations immobilières. « L’espace sera aussi aisément reconfigurable en cas d’événements ponctuels, comme la Nuit de l’ENS ».

Concernant les écoulements et la gestion des eaux, un système par infiltration sera privilégié, avec la réalisation de massifs inondables afin de réguler les eaux de surface. « Sur le plan végétal, nous allons retirer les plantes hétéroclites, qui ont été ajoutées ponctuellement au fil des ans et qui ne cohabitent pas bien. Elles seront remplacées par des variétés vernaculaires, en harmonie avec l’environnement existant », explique Yannick Laurenty.

Le projet propose aussi une gestion « apaisée » des flux de piétons et de véhicules de toutes natures, avec notamment le regroupement des stationnements à proximité des bennes de tri et la restriction implicite des circulations de véhicules.

Conserver l’équilibre entre la nature et l’humain

« Toute la complexité de ces travaux tient dans la préservation et l’harmonisation du végétal avec le patrimoine », indique le chef du pôle des opérations immobilières. « Ce projet vient recomposer une perspective visuelle entre plusieurs éléments patrimoniaux forts : le pavillon de Pasteur, le mûrier et, derrière lui, la statue dédiée au scientifique. »

Les travaux vont également permettre un autre regard sur les façades du bâtiment principal du 45 rue d'Ulm, grâce à l’aménagement de la base des édifices dans les courettes, du marronnier et du gymnase.

« La cour Pasteur s’inscrit en complémentarité avec les autres espaces extérieurs du site », résume Yannick Laurenty. « Au niveau de la végétalisation, elle offre une situation intermédiaire entre la cour aux Ernest, totalement aménagée et plantée, et la cour des bibliothèques, exclusivement minérale avec des plantations d’agrément en pot. C’est un écosystème fragile et précieux », souligne Yannick Laurenty, « nous avons un véritable devoir de valorisation et de préservation, tout en rendant cet espace accueillant pour les usagers. L’enjeu est double : trouver un équilibre entre la nature et l’humain, et prendre soin du végétal autant que du patrimoine. »

Une nouvelle vie donc pour la cour Pasteur qui, d’ici quelques mois, sera prête à accueillir de nouveau dans son écrin de verdure les étudiants et personnels de l’École pour un déjeuner ensoleillé, un instant de lecture, une conversation entre amis, et bien d’autres activités encore.