« La clinique juridique permet de renforcer ses méthodes pratiques de juriste polyvalent et pragmatique »
Rencontre avec Meryem Khouzaïmi, élève au département de Sciences sociales et responsable de la clinique juridique.
JurisprudENS est l'association des juristes de l’ENS, créée depuis 2020. Elle dispose d'une clinique juridique, qui permet d’aider la communauté normalienne sur de nombreuses questions juridiques (décisions administratives, droit des étrangers, droit associatif, discriminations, violences sexuelles). Rencontre avec Meryem Khouzaïmi, normalienne étudiante au département de Sciences sociales et responsable de la clinique juridique.
La clinique juridique de JurisprudENS permet « d’apporter de l’aide à l’information juridique et administrative à toute personne de l’ENS lui en faisant la demande », explique Meryem Khouzaïmi, passionnée de droit et de diplomatie. Ce soutien se manifeste à travers diverses actions : de l'aide aux démarches administratives à l'analyse et l'explication de décisions administratives, en passant par la recherche d'informations dans les codes de lois et les jurisprudences. « Cette activité est effectuée à titre bénévole par les membres de la clinique juridique. À côté de cette mission principale, nous pouvons être amenées à effectuer des formations sur certains points juridiques à des publics plus ou moins ciblés. »
L'objectif pour ce pôle de l’association JurisprudENS, est de démystifier le droit pour le rendre accessible et compréhensible à ceux qui en ont besoin. Contrairement aux services d’un avocat, la clinique se limite strictement à la fourniture d’informations et à leur explication sans émettre de conseils juridiques directs. « Nous ne faisons jamais de conseil juridique comme pourrait le faire un avocat. Premièrement, nous n’y sommes pas habilités. Deuxièmement, nous nous restreignons à strictement fournir toutes les informations nécessaires sans proposer une stratégie de réponse à la situation », précise Meryem Khouzaïmi.
Une initiative étudiante au service de la communauté normalienne
Comme nous l'explique Meryem, le processus n’en demeure pas moins juridique et encadré : « Par exemple, nous pouvons dans certains cas être amenées à expliquer des termes juridiques ou procéduraux utilisés dans une communication administrative (…) nous recherchons le contexte législatif et réglementaire qui s’y applique puis nous nous intéressons plus spécifiquement au message contenu dans le document afin de l’expliciter à la personne nous sollicitant (…) nous faisons de l’analyse, de la recherche et de la communication d’informations juridiques. Dans ces tâches, nous suivons des méthodes classiques en droit (celle du cas pratique et de la recherche juridique) tout en respectant des procédures internes votées lors des réunions régulières de la clinique. »
Concernant leur organisation, la clinique est structurée en deux pôles principaux : un pour les demandes régulières et un autre pour les demandes plus complexes, relatives aux discriminations et aux violences sexuelles. Cette organisation permet une réponse adaptée aux différents types de sollicitations, en s’appuyant sur les spécialités des membres bénévoles, toutes et tous issus d’un cursus juridique avec une spécialité, telle que le droit civil, le droit des contrats, le droit administratif et le droit des associations.
La clinique permet notamment d’aider à la rédaction de documents juridiques et administratifs, la rédaction de statuts, ainsi que l'analyse des risques juridiques potentiellement encourus par des personnes physiques ou morales. « Nous aidons à la rédaction des documents juridiques et administratifs des associations. Particulièrement, nous participons à la révision de certains statuts et règlements intérieurs », souligne la responsable.
Une activité impactante
Concernant l'impact de leur action, l'aide apportée, notamment en matière de droits des étrangers, cela peut avoir des répercussions significatives sur l'appréhension par les personnes concernées de leur situation administrative. « Pour les cas en lien avec les droits des étrangers, apporter une aide à la navigation des informations relatives aux titres de séjour et leurs conditions peut changer plus substantiellement une situation », note Meryem.
La clinique joue également un rôle crucial dans la formation pratique des étudiants et étudiantes en droit de l’ENS car elle « permet de renforcer ses méthodes pratiques de juriste polyvalent et pragmatique ». Une formation qui donne l'occasion de se confronter à des situations réelles, d'affiner des compétences de recherche et d'analyse juridique, et de développer un sens aigu des réalités humaines derrière les textes de loi.
Cependant, la gestion de la clinique n'est pas sans défis. Le tri des sollicitations, la gestion des urgences et le respect des lignes de conduite constituent des aspects délicats de leur travail quotidien. « Le principal défi dans la gestion de la clinique juridique est le tri des sollicitations que nous recevons », admet Meryem Khouzaïmi. « Nous veillons à toujours traiter celles-ci avec rigueur, indépendance, confidentialité et bienveillance ».
En dépit des défis, la clinique juridique de JurisprudENS continue de croître et de s’adapter aux besoins de la communauté normalienne. « Je m’exerce à croire en son avenir radieux parce que, pour moi, il s’agit d’un projet intéressant, stimulant et utile », affirme Meryem Khouzaïmi, reflétant l’optimisme et l’engagement des bénévoles envers cette initiative.
La clinique reste majoritairement sollicitée par la communauté normalienne et les associations de l’ENS, sans vocation à s’étendre au public extérieur, sauf cas spécifiques. « Notre demande provient majoritairement de la communauté normalienne et des associations de l’ENS », précise Meryem Khouzaïmi.
L'engagement des membres de la clinique
Les membres de la clinique de JurisprudENS s'expriment sur leur engagement personnel et la raison de leur implication au sein de l'association.
Lou Bonkowski – normalienne, membre du Parcours droit
« Le droit régit un grand nombre de rapports sociaux, toutefois il n’en reste pas moins un magma d’informations parfois difficile à assimiler. Par mon engagement au sein de la clinique juridique, je souhaite donc contribuer, à mon échelle, à faire du droit un instrument, au service de celles et ceux qui y ont habituellement le moins accès et dont la légitimité à s’en saisir est parfois remise en cause. »
Lhouciene Ait Ismail – normalien, membre du Parcours droit
« J’ai remarqué au fil du temps que seul, il est difficile d’entrer dans la machine judiciaire en général. Pour certains et certaines, sans accompagnement, ils et elles sont vites broyées par les rouages de la justice. C’est pourquoi j’essaie au mieux de m’investir pour essayer de partager ma culture juridique. Mon investissement vise essentiellement à pouvoir orienter vers des acteurs clés qui sauront répondre à certaines problématiques précises, et d’apporter rapidement les outils nécessaires quand on s’aventure sur le terrain de la justice. Et si ce n’est au moins un espace bienveillant pour accueillir toute parole pour celles et ceux rencontrant des difficultés face à la défense de leurs droits et au respect de ceux-ci. »
Meryem Khouzaïmi – normalienne, membre du Parcours droit
« Mon investissement bénévole à la clinique traduit un engagement pour la concrétisation de l'accès aux droits. Accéder à ses droits est matériellement crucial, et parfois même symboliquement. La perspective du droit peut aussi aider à faire sens d'une violence vécue. Pour cela, la création d'un pôle spécifique pour le traitement des sollicitations en matière de violences sexuelles et de discrimination (de tous types) me tenait particulièrement à cœur. »
Zinédine Saoudi – normalien, membre du Parcours droit
« J'apprécie beaucoup l'idée de rendre accessible le droit à tous. Cet engagement me semble essentiel face à l'apparence austère du droit qui décourage souvent les usagers de faire valoir leurs droits. En outre, l'activité à la clinique est passionnante, j'invite tous les juristes de l'ENS à nous rejoindre ! »