Sommes-nous curieux par choix ou par hasard ?
Parution dans la revue scientifique Nature Neuroscience
Une équipe de recherche de l’ENS dirigée par Valentin Wyart, lauréat d’une bourse ERC en 2017, a découvert que le cerveau humain tire parti de ses erreurs pour explorer l’inconnu. Ces résultats viennent d’être publiés dans le journal Nature Neuroscience.
Les régions cérébrales qui s'activent lorsque les participants explorent des actions aux issues incertaines (en jaune) sont les mêmes que celles qui s'activent lorsque les participants commettent des erreurs de raisonnement (en bleu).
Sommes-nous curieux par choix ou par hasard ?
Pourquoi certains de nos choix semblent-ils être poussés par l’envie d’explorer l’inconnu ? Accompagné de Vasilisa Skvortsova et Charles Findling, deux post-doctorants de son équipe, Valentin Wyart s’est penché sur la question. En collaboration avec le chercheur Stefano Palminteri, l’équipe de recherche a mis au point un nouveau modèle mathématique de prise de décision basé sur l'apprentissage par renforcement. Un algorithme très utilisé en intelligence artificielle ! Grâce à cette collaboration, l’équipe de recherche a découvert que « notre cerveau utiliserait ses propres erreurs pour produire des choix vers l’inconnu, sans s’appuyer sur notre curiosité. »
Pour Valentin Wyart, « si ces résultats peuvent paraître surprenants, de nombreuses découvertes majeures sont le résultat d’erreurs de raisonnement : la découverte de l’Amérique par Christophe Colomb, mais aussi la découverte de la radioactivité par Henri Becquerel ou encore celle du pacemaker par John Hopps. D'ailleurs, l'évolution des espèces repose elle aussi sur des variations aléatoires du génome, autrement dit des erreurs génétiques, dont certaines sont conservées par sélection naturelle. »
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Des recherches qui se poursuivent
L’équipe recherche actuellement si les erreurs d'évaluation observées dans cette étude pourraient être régulées dans le cerveau par le système neuromodulateur de la noradrénaline, en contrôlant la précision des opérations mentales effectuées par le cerveau. Ils souhaitent également mieux comprendre comment ces erreurs d'évaluation interagissent avec la curiosité pour guider les décisions sous incertitude. Valentin Wyart poursuit, « nous voyons les erreurs d'évaluation non comme des ratés de la cognition humaine, mais comme une source de variabilité potentiellement bénéfique pour la découverte d'information dans des environnements incertains »
Valentin Wyart et son équipe de recherche
Chercheur Inserm au laboratoire Neurosciences Cognitives et Computationnelles du Département d'Études Cognitives de l'ENS, Valentin Wyart s’intéresse aux mécanismes cognitifs et cérébraux du raisonnement humain et de la prise de décision. Ses projets de recherche actuels portent plus particulièrement sur l'origine des erreurs de décision.
Son équipe de recherche étudie les sources d'erreurs de décision en modélisant mathématiquement la prise de décision. Ce processus permet de comprendre et prédire les décisions humaines prises sur la base d'informations imparfaites. Des enregistrements de l'activité cérébrale et de dilatation pupillaire sont utilisés par l’équipe pour prédire certaines erreurs de décision avant qu'elles ne se produisent. Les résultats de ces recherches sont utilisés pour mieux caractériser certaines maladies psychiatriques (schizophrénie, troubles obsessionnels-compulsifs) qui montrent une altération de la prise de décision sous incertitude.