Exposition itinérante "Désert vert"
Série photographique de Gaëlle Ronsin (socioanthropologue, CERES)
Dans le désert du Sonora aux États-Unis, les cactus Saguaros, emblèmes de l'Arizona, meurent. La série photographique de Gaëlle Ronsin (socioanthropologue, CERES) témoigne de la fin du cycle de vie de ces végétaux tout en questionnant les modes d'alertes et de sensibilités face à l'extinction de la nature.
Cette série photographique, publiée en premier lieu dans la revue d’anthropologie Terrain, se déroule dans le désert du Sonora, en Arizona (USA), arpenté durant un séjour de recherche à l'IRL iGlobes. Des milliers de cactus Saguaro (Carnegiea gigantea) se dressent dans le paysage. Les habitants de cet État les désignent comme des arbres (« treelike saguaros ») et parlent de la « cactus forest ». Les cactus sont individualisés, prénommés selon leur forme, personnifiés par les légendes ou considérés comme des monuments. Le cactus Saguaro est devenu une icône culturelle grâce à la masse d’iconographies produites depuis le XXè siècle sur ces géants du désert. Il est devenu l’emblème naturel à protéger. Un parc national - le Saguaro national park - a été créé pour conserver son habitat en 1994.
Comme en témoigne la série photographique, ces végétaux se décomposent très lentement dans le désert. La mort de ces végétaux confronte aux menaces de l’Anthropocène sur ce milieu: étalement urbain, réchauffement, feux, plantes invasives. Des actions scientifiques, associatives et médiatiques participent à créer un climat d’alerte autour des cactus, qu’il faudrait « sauver ». Pourtant, ces cactus se portent plutôt bien, selon les critères naturalistes. Le rythme rapide des détériorations environnementales ne suit pas le rythme si lent du développement ou de la décomposition des cactus. Ces végétaux mettent plus de cinquante années à devenir « adulte ». Le rapport du GIEC ne laisse, lui, que trente ans avant que le monde ne devienne inhabitable. Ces cactus ont leur propre temporalité qui ne sera pas bousculée par les crises qui nous hantent. L’ombre portée par la mort des cactus invite à regarder ailleurs. La surveillance opérée dans ce désert s’exerce par les acteurs publics étatsuniens sur les cactus mais également sur les peuples autochtones et plus encore sur les étrangers, en l’occurrence ceux qui tentent de passer la frontière entre les Etats-Unis et le Mexique. Le désert du Sonoran est devenu un véritable cimetière. Depuis 1990, les restes humains de 3356 personnes y ont été retrouvés.
Crédits
Textes et images: Gaëlle Ronsin
Graphisme: Laura Quidal
Soutien institutionnel : IRL iGlobes, CNRS - Univ. d'Arizona - ENS CERES, UFC
Mis à jour le 2/4/2024